LE MAGAZINE DES DÉCIDEURS & DES RÉSEAUX DE BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ

Présider la BFC

Élu président du Conseil régional en septembre 2025, Jérôme Durain veut renforcer la cohérence et l’attractivité de la Bourgogne-Franche-Comté. Mobilités, économie, transition, ruralité : il détaille pour Décideur les priorités d’une Région qu’il veut plus réactive et plus proche de ses territoires.

Décideur. Dix ans après la fusion, estimez-vous que la Bourgogne-Franche-Comté a trouvé sa cohérence et son identité ?

Jérôme Durain. Cet anniversaire permet d’évaluer les fusions, sans fantasme. Les grandes régions étaient d’abord une décision administrative, préparée chez nous par Marie-Guite Dufay et François Patriat. Sur le plan opérationnel, c’est une réussite : un ensemble plus fort, plus visible nationalement, avec des politiques publiques plus puissantes, notamment en matière de mobilités, et un échelon économique pertinent face à la compétition internationale.
L’identité évolue plus lentement, ce qui est normal : chacun reste attaché à ses racines, même si la cohérence de notre ensemble est souvent reconnue, notamment pour nos identités industrielles, agricoles et rurales. Je ne sais pas si une identité unique émergera un jour, mais je suis convaincu que nous avons tout à gagner à bâtir une histoire commune à partir de nos fiertés respectives.

Comment la Région agit-elle pour l’attractivité économique du territoire ?

L’attractivité passe par nos fiertés, que je veux mettre en avant face à ceux qui ne regardent que ce qui ne va pas. Nos objectifs sont clairs : accompagner les entreprises, renforcer l’attractivité, soutenir l’innovation et la transition écologique, en lien étroit avec les territoires, les EPCI – dont 86 sont actionnaires de l’AER – et l’ensemble des acteurs économiques et sociaux.
Pour moi, ce n’est pas un slogan : c’est une action réelle, menée partout dans la région, au plus près des entreprises. Avec la Direction de l’économie, les collectivités, les chambres consulaires et les entreprises, je veux porter cette ambition avec détermination. La Région fixe le cap et mobilise les moyens ; l’AER, elle, intervient sur le terrain – proximité, réactivité, ingénierie, prospection – pour transformer les projets en réussites.

Jerome DURAIN visite l'entreprise BAM

POUR MOI, L’ATTRACTIVITÉ ÉCONOMIQUE DE LA RÉGION N’EST PAS UN SLOGAN : C’EST UNE ACTION RÉELLE.

Jérôme Durain, président du Conseil Régional de Bourgogne-Franche-Comté

Comment concilier développement économique et transition énergétique, sans opposer écologie et emploi ?

Nous accompagnons le monde économique via le soutien à nos filières d’excellence, aux secteurs en difficultés (comme l’automobile), à l’émergence de nouvelles filières et à l’innovation en lien avec notre recherche régionale. Nous avons par exemple des dispositifs spécifiques pour accompagner les entreprises dans leurs efforts de décarbonation ou vers des pratiques plus vertueuses.

Les acteurs privés attendent souvent plus d’agilité du secteur public.

Tout le monde attend plus d’agilité du secteur public, au niveau national comme au niveau régional. Les bouleversements mondiaux exigent une réactivité accrue, y compris pour les acteurs régionaux. À notre échelle, je mise sur un dialogue constant : je rencontre les entrepreneurs, j’écoute leurs besoins et je relaie leurs inquiétudes. La Région s’efforce d’être plus proche de ses usagers, plus souple et plus accompagnante dans la mise en œuvre de ses actions.

Où en est la réflexion sur les mobilités régionales, la logistique et les infrastructures économiques ?

Je veux insister sur un point : les trains arrivent à l’heure, et les habitants le voient. La fréquentation a augmenté de 14 % en 2024 : les trains Mobigo transportent désormais 75 000 personnes par jour. Nous avons massivement investi pour améliorer les conditions de voyage : 24 rames Régiolis ont remplacé les anciens trains Corail, et 14 rames supplémentaires, pour 170 millions d’euros, ont été commandées cette année, dont cinq pour l’axe Paris, Migennes, Dijon, Chalon, Mâcon, Lyon.
Nous finançons aussi la remise à niveau du réseau, dans le cadre des contrats de plan et au-delà, car son vieillissement est un enjeu majeur. C’est un réseau appartenant à l’État, mais celui-ci n’assume pas pleinement ses obligations. J’ai donc pris mes responsabilités en mobilisant des moyens régionaux pour sauver des petites lignes fragilisées, y compris pour le fret. La Région ne pourra toutefois pas tout porter seule : je me battrai pour que l’État prenne sa part et que les infrastructures ferroviaires reviennent au cœur du débat national. Enfin, en matière de mobilités, notre second plan vélo monte en puissance : articulation avec trains et cars régionaux, intégration du vélo dans les lycées, économie circulaire avec le vélo de seconde main… Un volet plus opérationnel, pensé pour répondre aux nouveaux usages.

Votre prédécesseure s’interrogeait sur l’avenir d’un aéroport civil en BFC. Avec les nouvelles lignes annoncées, de quel œil voyez-vous ce projet, aujourd’hui ?

Je n’ai absolument rien contre les voyages en avion. Mais est-ce la priorité de la Région, de financer des lignes pour permettre à nos habitants d’aller faire du tourisme ailleurs ? Dans un environnement contraint, je préfère mettre la priorité sur l’arrivée de nos voisins étrangers chez nous.

Comment maintenir un équilibre entre les métropoles régionales et les territoires périphériques ?

Dès mon élection, j’ai parcouru nos huit départements pour mesurer les besoins. Le soutien à la ruralité et aux territoires périphériques est une priorité, avec des dispositifs dédiés à chaque échelle. ENVI accompagne les petits villages sur leurs projets d’infrastructures ou de services, comme des épiceries de proximité ; le programme Centralités rurales en région soutient, lui, 126 communes moyennes. Ces actions renforcent la dynamique commerciale, l’attractivité et le cadre de vie. Notre ligne est claire : donner plus à ceux qui ont moins. Quand Dijon reçoit 16 euros par habitant, les territoires les plus fragiles en reçoivent 60. Voici, un élément concret de la politique de contractualisation de la Région avec les territoires.

Texte : Alban Salmon / Photographie : David Cesbron, DR

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