Alors que l’intelligence artificielle s’invite dans tous les métiers, la Caisse d’Épargne Bourgogne-Franche-Comté fait figure d’exemple. L’établissement a su conjuguer innovation technologique, prudence éthique et ancrage humain pour faire de l’IA un levier concret d’efficacité et de confiance. Entre acculturation des équipes, développement d’outils internes et vision responsable, la banque régionale construit un modèle de transformation à son image.
À la Caisse d’Épargne Bourgogne- Franche-Comté, l’intelligence artificielle n’est pas une promesse lointaine, mais une pratique déjà bien ancrée, au service à la fois des collaborateurs et des clients. « L’IA fait partie intégrante du plan stratégique du groupe », rappelle Jérôme Desbois, Data & IA Manager. L’établissement a déployé depuis 2023 sa propre IA générative, MAiA, un environnement fermé, sécurisé et éthique, spécialement conçu pour l’usage bancaire. « Nous avons plus d’un collaborateur sur deux qui l’utilise chaque mois, et un taux de fidélité de 70 % », précise-t-il.
Au-delà de la technologie, la réussite du dispositif repose sur un mot d’ordre : l’acculturation. « Avoir l’outil, c’est bien. Savoir s’en servir, c’est mieux », résume Grégory Louchet, directeur du Développement Entreprises et Institutionnels. L’IA générative permet d’automatiser des tâches à faible valeur ajoutée – rédaction d’emails, analyse de documents volumineux, préparation de rendez-vous, comptes rendus augmentés – tout en libérant du temps pour la relation commerciale. « L’objectif, c’est de fluidifier le quotidien des conseillers et de recentrer l’humain sur l’essentiel : le conseil et la proximité », poursuit-il.
L’IA FAIT PARTIE INTÉGRANTE DU PLAN STRATÉGIQUE DU GROUPE.
Jérôme Desbois, data et IA manager
Cette approche pragmatique s’appuie sur une conviction partagée : la technologie n’a de sens que si elle améliore l’expérience des utilisateurs, internes comme externes. « Nous parlons de symétrie des attentions : le même soin apporté au parcours client qu’au parcours collaborateur », souligne Grégory Louchet. Dans les agences, cette philosophie se traduit par des chatbots de nouvelle génération, capables de répondre de manière fiable aux demandes les plus courantes. « Nous ne cherchons pas à aller vite. Tant que la qualité des réponses n’est pas satisfaisante, nous ne déployons pas. », insiste Jérôme Desbois.
L’enjeu, pour une banque mutualiste, demeure avant tout la confiance. Bien que MAiA recoure au cadre technologique formel qui fait de ChatGPT l’outil efficace que l’on connaît, l’outil « maison » de la Caisse d’Épargne Bourgogne-Franche- Comté fonctionne dans un environnement strictement fermé : aucune donnée ne quitte le périmètre de l’entreprise. « Si MAiA analyse un bilan, le fichier reste dans l’infrastructure de la banque, il ne part pas sur un serveur externe », explique Jérôme Desbois. « Nous ne pouvions pas risquer la moindre fuite de données, ni compromettre notre rôle de tiers de confiance », renchérit Grégory Louchet.
L’adoption rapide de MAiA s’explique aussi par une démarche d’accompagnement continue. Formations à « l’art du prompt », concours internes pour partager les meilleures pratiques, semaine de l’IA organisée deux fois par an : tout un dispositif est mis en place pour que les 1 600 collaborateurs s’approprient ces nouveaux usages. « L’important, c’est d’apprendre à questionner intelligemment une IA générative. Une mauvaise requête, c’est une mauvaise réponse. Il faut comprendre comment interagir avec l’outil », souligne Jérôme Desbois.
Loin de se limiter aux aspects techniques, cette transformation dessine une nouvelle culture de travail. Les usages se multiplient, les initiatives se croisent, et l’IA s’installe peu à peu dans les processus métiers. « Nous en sommes au même point que lors de l’arrivée du digital il y a vingt ans : c’est une mutation profonde, pas une mode », estime le Data & IA Manager. Et la Caisse d’Épargne Bourgogne-Franche-Comté entend bien la conduire à sa manière : en conjuguant innovation, prudence et ancrage humain.
Texte : Alban Salmon / Photographie : Jonas Jacquel
