Le vin, boisson qui était encore servie dans les cantines scolaires jusqu’en 1956, est devenu au fur et à mesure du temps, surtout lorsqu’il s’agit de flacons bourguignons, un véritable produit de luxe, rare, et donc cher. De quoi attirer les convoitises.
Saviez-vous que la production bourguignonne représente seulement 3% de la production française ?
Saviez-vous également que parmi ces 3%, les grands crus ne représentent que 1% ? En d’autres termes, déguster un grand cru de Bourgogne, c’est être très, très chanceux, car vous avez alors dans votre verre 0,03% de la production française… alors que dire à l’échelle internationale ? Plusieurs milliers, voire dizaines de milliers d’euros sont parfois nécessaires pour s’offrir une de ces bouteilles tant convoitées. Romanée Conti, domaines Rousseau ou Coche-Dury, sont quelques exemples de grands noms de viticulteurs bourguignons qui, à leur seule évocation, mettent des étoiles dans les yeux des amateurs du monde entier. Une bouteille de Romanée-Conti millésime 1945 a été adjugée, en 2018, 558 000 dollars (482 000 euros), lors d’une vente aux enchères. Non, vous ne rêvez pas, il ne manque pas de virgule dans le chiffre. Alors forcément, de tels trésors attirent les convoitises… et les escrocs.
Des vols et des faux
Cela commence bien entendu par les vols. Depuis quelques années, de très grands restaurants ont vu leur cave pillée et parfois des centaines de bouteilles, plus recherchées les unes que les autres, ont été dérobées en un seul et même larcin. Ainsi, le restaurant parisien la Tour d’Argent a vu disparaître, au début de l’année 2024, 80 flacons des vins les plus prestigieux. Montant du préjudice : 1,5 million d’euros. Bien entendu, voler est un délit. Mais détenir simplement une bouteille dérobée l’est également, si vous ne pouviez ignorer l’origine frauduleuse de la bouteille. Alors avant d’acheter une bouteille à un prix qui peut sembler une (trop) bonne affaire, prenez toutes les précautions nécessaires. Le risque encouru ? Cinq années de prison et 375 000 € d’amende.
D’autres, à défaut de les voler, ont imaginé créer de fausses bouteilles, soit en remplissant de vraies bouteilles originales avec un vin qui ne l’était pas, soit en falsifiant, en plus du vin, l’étiquette et toutes les caractéristiques de flacons de grands domaines. Le plus connu de ces faussaires a sévi aux États-Unis au début des années 2000. D’origine indonésienne, il s’est fait passer pour un collectionneur de grands vins et a vendu, pour plusieurs dizaines de millions d’euros, de fausses bouteilles de vin. Il a été finalement démasqué, arrêté et jugé, le tout grâce à un viticulteur de notre belle Bourgogne qui s’est rendu compte de la supercherie. Là encore, il s’agit de deux infractions pénales, l’escroquerie et la contrefaçon, punies des mêmes sanctions que le recel. Alors vous l’aurez compris, accéder à la grande Bourgogne viticole a un prix et n’est pas sans risque. Vous voulez vous faire plaisir ? Certes, acheter aux domaines est bien souvent un parcours du combattant car la plupart d’entre eux n’ont pas de bouteilles à proposer, l’intégralité de la récolte étant vendue d’avance. Mais il existe d’excellents cavistes, en Bourgogne mais pas uniquement, qui sauront vous aiguiller et vous aider dans vos achats et, surtout, de manière parfaitement légale. Pour éviter la spéculation et la falsification, de plus en plus de domaines identifient leurs bouteilles soit avec des numéros soit avec des moyens numériques. En cas de doute sur l’authenticité d’une bouteille, avant de l’acheter, n’hésitez pas à contacter le viticulteur concerné. Et avant toute chose, n’oubliez pas que le vin est un objet de partage et de convivialité à consommer (avec modération) entre amis, avant d’être un placement ou un moyen de s’enrichir…
Fabien Kovac, avocat au barreau de Dijon Du Droit de la Vigne et du Vin
Cabinet DGK AVOCATS ASSOCIÉS
www.cabinetdgk.com
Texte : Fabien Kovac / Photographie : Jonas Jacquel
